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mercredi 28 mars 2012

27 janvier 2012
Au passage, sans plus approfondir, mais dans l’idée de le faire un jour, le poète se demande si le numérique n’est pas l’expression cybermoderne du baroque. Soit. Il ne souhaite pas s’investir corps et âme et exclusivement dans le numérique, l’écriture et la littérature numériques ou publication numérique, il souhaite interroger cette hyper-cyber-modernité, s’en inspirer, regarder cela comme un monde qui prend forme ; sa curiosité le porte vers cela pour ce qu’il ne veut pas ignorer le monde dans lequel il vit, ni se laisser happer par lui ; il n’est nullement tourné vers le passé ni nostalgique d’aucun monde que ce soit : il se veut parmi son temps, avec ses dispositions et attraits, goûts et préférences ; c’est un observateur naïf et curieux du numérique, comme source et ressource. Il pressent le terme de son travail tout proche, pressentiment facile, puisqu’il ne lui reste plus qu’un poème à fabriquer ; or, de ce pressentiment commence à émerger un début de soulagement, et soulagement ne signifie en rien souffle ni « ouf de ». Il pense à J. , F. et M., à l’association Les Rias, là-bas, en Ardèche, aux personnes et lieux auxquels il n’a cessé de pensé le long de ce travail. (Il s’empare de son Dictionnaire historique de la langue française aux éditions Le Robert, répondant à sa tendance à réfléchir avec l’étymologie des mots, parce que lui revient en mémoire le mot « fauteur », dévalorisé à cause de l’expression « fauteur de troubles », qu’il a lu au matin chez Alain Rey qui tente de le réhabiliter dans son Amour du français, écrivant à propos de Rabelais : « ce grand fauteur de progrès » (entendez : de la langue française) : : : mot qui l’interpela bien, pour qu’il s’en souvienne maintenant : « est emprunté, d’abord sous la forme fateur (1295) au latin classique fautor, fautrix « personne qui favorise », « soutien, partisan », du latin archaïque favitor, dérivé de favere « être favorable » (àfaveur) Le mot a désigné une personne qui protège et favorise qqun, sens vivant à l’époque classique. Sous l’influence de faute, il s’est spécialisé (1596) à propos d’une personne qui favorise une action blâmable ; il est inusité au féminin. Détaché de son origine (favorisateur), senti comme dérivé de faute* il s’emploie surtout dans le domaine politique (fauteur de troubles), plus couramment dans l’expression fauteur de guerre ». Mais trêve de digression, le poète était sur le point de réfléchir au soulagement.) Du mot « soulagement », non pas l’acception substantivale, mais l’acception verbale d’alléger, « alléger le travail de quelqu’un ». Le poète va, achevant son travail, alléger l’individu dans lequel il a pris position et vie ; l’individu en question ne sera pas allégé du poète, et ne veut certainement pas l’être, c’est son bernard l’ermite, le solitaire réfugié en lui. Le poète, achevant un travail, provoque une détension du corps et de l’esprit et dans le même temps une intensification temporelle qui concentre la durée et l’instant et qui ressemble de près à la volupté érotique. Cette considération l’amène au poème final, « De la tension », à sa phrase courte, ironique.

Et c’est ainsi qu’on s’allège, voluptueusement.



DE LA TENSION

Le poète est un fauteur de troubles —

lundi 19 mars 2012


21 janvier 2012
Va-et-vient permanent entre le journal-brouillon-papier et le blog-brouillon-public, croisements et influences, dialogue, et non séparation des medias, et guerre entre eux (il y a tout sauf ceci : « Le choix n’est pas pour ou contre internet, c’est le net ou rien » d’Antoine Emaz, in Cuisine, livre numérique ; le « rien » ici brandi fait grand peur). Il n’est nullement question d’obéir à la pression du temps, mais d’opérer un échange entre deux medias qui devraient se compléter, non pas s’opposer, ce que nous trouvons dans l’un comme satisfaction nouvelle, nous ne l’avons pas dans l’autre, mais ce que dans l’autre nous avons comme plaisir ancien renouvelé, nous ne le trouvons pas dans l’un, les temps numériques et les amours papiers sont unissables, le poète refuse la politique du rejet, refuse la nostalgie. Aucune table rase. Le journal de travail du poète est un faux journal, c’est un journal raturé, retravaillé, nullement livré tel quel sur le blog aux yeux du cyberlecteur ; sans parler des ratures mentales qui opèrent pendant la saisie.

23 janvier 2012
Deux poèmes restent à écrire ; il importe de ne pas céder à la tentation de précipiter le terme de cet ensemble, de ne pas bâcler le travail, de maîtriser l’impatience qui est la pression du monde extérieur, de rester encore hors du temps, même si l’approche du terme est une excitante pression sur l’esprit. Le poète choisit d’entreprendre le poème « Du baroque et du maniÉrisme », deux éons littéraires qui auront exercé une influence sur sa manière d’accepter son sentiment pensé du monde. Comme il réfléchit à ce poème, une amorce d’attaque prend forme qui exprime sa réception des deux éons, en alternance ou entremêlés ; « tantôt l’un, tantôt l’autre, souvent ensemblement »[1]. La forme de son poème, en bloc, posé sur la page avec assurance et conviction et obstination d’une forme ferme et sûre d’elle, créativement contraignante, qui s’impose et ne souffre autre évidence, (« Le discours baroque asserte sans modaliser, il est catégorique et impératif. Il cherche l’efficace d’une parole qui entend à la fois persuader et convaincre », Gisèle Mathieu-Castellani), est baroque, forme qui contient toutes les incertitudes d’une pensée  émue et d’être, la mésassurance à l’égard de son propre écrire, la suspension interrogative[2], qui se manifeste au moyen d’une phrase fantaisiste et allant au caprice et à sauts et gambades, hésitante, heurtée (« Le discours maniériste ne cherche ni à convaincre, ni à émouvoir, il est sceptique, il dit le doute, l’incertitude, le suspens, et, comme le dit Odette de Mourgues, il manque de conviction. L’énoncé est questionnant, problématisant toute assertion. C’est que le sujet lui-même doute, il doute de posséder la Vérité, ne trouvant dans le monde qui l’entoure que de confuses images, il doute de lui-même et de son identité, toujours mal assurée », Mireille Mathieu-Castellani), saturée de figures ayant apparences ornementales, artificielles diraient d’aucuns[3] , or, maniériste. Le maniérisme (revendiqué) est coulé dans le baroque (revendiqué). Ce écrivant, il effectue des allers et des retours entre la prose pensive et son poème en cours d’écriture, cela provoque d’agréables excitations ; le réflexif et le créatif se transmettent à l’un et à l’autre une énergie de plaisir.


25 janvier 2012
La perspective néanmoins de l’achèvement fait naître doucement une excellente pression sur le poète ; une surexcitation agréable à recevoir. Mais revenons au travail en cours de réflexion. Le monde est une gigantesque bizarrrie complexe ; on ne peut le regarder qu’avec sombre étonnement et scepticisme appuyé, constater non pas son caractère changeant, mais insaisissable. Une vision poétique du monde est une mimesis de l’insaisissable fragmenté, une mimesis capricante, une mimesis raisonnée de l’irraison. L’imagination de la phrase du poème en bloc se veut essai de suivre cet insaisissable mouvement du monde au cœur duquel un être, parmi d’autres par milliards, raisonné, essaie de trouver une situation stable, formelle par sa volonté. L’indécis gouverne cet être-là, tel Etienne Durand (1585-1618) dans ses stances :

Nostre esprit n’est que vent, et comme un vent volage,
Ce qu’il nomme constance est un branle rétif :
Ce qu’il pense aujourd’huy demain n’est qu’un ombrage,
Le passé n’est plus rien, le futur un nuage,
Et ce qu’il tient présent il le sent fugitif.

Je pendrois volontiers mes légères pensées,
Mais desjà le pensant mon penser est changé,
Ce que je tiens m’eschappe, et les choses passées,
Tousjours par le présent se tiennent effacées,
Tant à ce changement mon esprit est rangé.

Cela est de l’éon.

Les différentes moutures du poème s’avèrent insatisfaisantes :

1ère mouture :

DU BAROQUE ET DU MANIÉRISME

Savez-vous pas que ni tantôt l’un, tantôt l’autre, ensemblement souvent, et selon le principe d’incertitude assurément énoncé dans un poème posé là, dans des sinuosités intérieures fantaisistes et capricantes et certes —


2ème mouture :

DU BAROQUE ET DU MANIÉRISME

Et rien ne dure en [la] vague pensée qui ne prescrit rien à certes que la certitude qui pose et qui pèse en bloc le poème là plein d’une incertaine figure fantaisiste et capricante qui ne sait quoi —


3ème mouture :

DU BAROQUE ET DU MANIÉRISME

Et rien ne dure en [la] vague pensée fantaisiste et capricante et sinueuse qui ne prescrit rien à certes autre que la certitude qui pose et qui pèse en bloc un poème là plein d’une incertaine figure qui ne sait quoi ferme —


Ces trois moutures ne pénètrent pas, pour cause de trop de brièveté, l’insaisissable bizarrrie sublunaire : il faut donc rallonger la phrase, la rendre insaisissable et pénétrante de complexité. Une insistance persiste, qui vient de sa connaissance des poésies baroque et maniériste : celles-ci en effet s’appuyaient sur des formes relativement longues, sur le  minimum du sonnet (Sponde, Chassignet), jusque l’élégie ou l’épopée (d’Aubigné), par quoi l’esprit pouvait s’enfoncer avec autant de légèreté que de gravité dans ses propres abysses à dessein d’en peindre alors les linéaments circonlocutoires. Il faut donc que le poète déploie son poème… Il regarde la troisième version sur son écran d’ordinateur, qu’il verse dans la quatrième, dans son carnet, mouvement de quoi va naître l’idée suivante au sujet de la longueur du poème (le poète rassemblant la force de ses connaissances en poésie dans le mouvement concentré du travail), issue de ses lectures de Jacques Roubaud : Écrire un sonnet en bloc. Décision est prise. Mais une autre chose le tarabuste dans le sens de l’insatisfaction, qui est l’adjectif qu’il vient de forger à propos du monde libéral, du rythme effréné du capitalisme croissant, qu’il veut mettre en contradiction avec l’idée qu’il se fait d’un monde rapiécé, fait de bouzigues, et qu’il veut glisser dans le poème à venir : « néo-libéralistutilitaire » ; il n’en est pas mécontent, mais insatisfait : il le veut plus précis, afin qu’il concentre sa vision pessimiste du monde. Vint alors le désir d’un nouvel hommage au Grand Maître de l’abstraction de quintessence verbale, le désir d’enfanter d’un « monstre linguistique » (Madeleine Lazard) de la sorte : « Il ne leurs a sufffis m’avoir ainsi lourdement morrambouzevezengouzequoquemorguatasacbacguevezinemaffressé mon paouvre œil : d’abondant ilz m’ont defoncé le tabourin. » (Quart Livre) (Le chapitre contient pléthore de ces mots gigantaux).



DU BAROQUE ET DU MANIÉRISME


Et rien ne dure ferme en ma vague pensée fantaisiste et capricante et sinueuse et tarabuscotée sur le sujet de l’insaisissable bizarrrie sublunaire où tout semble en liaisons
fragmentées et à pièces décousues quoique régi par un rythme croissant constamment néo-commermarchanpitalelaylibéréalistipubilitaire dans sa course vers la fin non prévue mais prévisible malgré le développement durable et crainte par un esprit en refraictaire confusion se ressassant que le passé n’est plus rien, le futur un nuage nucléaire, et qui ne prescrit rien à certes que la certitude qui pose et pèse en bloc le poème, là, plein d’un doute ferme —


[1] « souvent ensemblement » ne figurait pas dans le carnet, cela fut rajouté au moment de la saisie.
[2] Il considère James Sacré comme le plus évident maniériste moderne.
[3] « Précisons-le dès l’abord, “l’ornement”,  n’est pas la fioriture, il n’est jamais gratuit, ni chez Montaigne, ni chez aucun des grands Maniéristes du siècle. L’œuvre maniériste est saturée de sens, pénétrée d’intentions et d’allusions à déchiffrer, figurées par de multiples symboles, des plus érudits aux plus quotidiens, que matérialisent les “ornements” » (Géralde Nakam, « La “maniera” de Montaigne : quelques traits, et leur sens » in revue  Epistémè n°9

lundi 12 mars 2012

18 janvier 2012
Restent trois poèmes à écrire, et le contrat du poète sera rempli ; un contrat à poèmes déterminés (20). Le contrat aura été la contrainte. Son regard fait un arrêt prolongé sur « De l’ancien et du moyen français » ; la concentration a la vertu de provoquer un souvenir :

Il est, en tant que poète, devant un parterre d’enseignants en formation et doit répondre à une salve de questions à propos de son écriture et à propos de la poésie contemporaine quand dans la salve une remarque fuse : il y a un mot bizarre dans l’un de vos poèmes, est-ce que c’est une coquille, ce mot c’est « nel », dans « je nel sais ». Ce n’est nullement une coquille, répond le poète, c’est un médiévisme que je me suis accordé, comme souventes fois jel fais, surenchérit-il, en effet, en ancien français, le pronom personnel est constitué d’une forme atone (je, me, tu, te etc.) et d’une forme tonique (moi, toi etc.) Les formes atones parfois s’appuient sur le mot qui le précède et se constitue en contraction avec lui : « je nel sais » est « je ne LE sais », et, cela reprenant, et faisant, je les pense comme des archaïsmes désarchaïsés puisque ça se passe dans le mouvement vivant de ma langue, et comme des rappels philologiques glissés dans le poème. Je suis un grand lecteur d’œuvres courant du IXe siècle au mi-XVIIe siècle, dans les langues et graphies originales autant que possible, et ces insertions diachroniques sont les marques de mon goût, mêmement, et prononcé, pour ces œuvres et langues du passé et mon souci d’explorer l’histoire de la langue, j’arpente poétiquement l’histoire de la langue française, conclura-t-il.

Ce qui le met en appétit, et curiosité, et éveil, et alerte, et joie… C’est une manière d’être dans l’infini de la langue. Une fois qu’il est poète, il se transforme en être-de-langue. (Et en Merlin atténué.) Le poète ne peut se soumettre à la fixation de la langue française, ne peut suivre l’ordre naturel et imposé et codifié (par conséquence non naturel) des mots selon la théorie cartésienne du signe qui prétend que la pensée tend à la clarté du SVC, sujet-verbe-complément ; le poème répond poétiquement, négativement et rétivement à cela, conteste ce principe qui est un principe de pouvoir et d’autorité et ne correspond nullement au contact sensible avec le réel, qui ne repose pas sur la logique. Le poète pense en suivant son rythme du coq-à-l’âne ; les cinq sens modifient constamment sa perception de la réalité et la marche de sa pensée enfoncée dans celle-ci, sa pensée est souvent une fatrasie ; tout est discontinué. Ses poèmes sont une danse macabre, et un dense vivant ; ils font danser mots morts, expressions mortes, tournures mortes, graphies mortes ; il souhaite à la langue française une luxuriance baroque par réinventions constantes ou inventions héritées de « la fécondité des grandes périodes d’effleuraison lexicale » (Bernard Cerquiglini) et graphiques ; outre qu’il se délecte du français d’« avant la faute » (B.C.), il contient difficilement son plaisir à mâcher de la langue afin de s’emplir l’être de volupté intemporelle.


20 janvier 2012
Ce ne sera faute d’être répétitif et ressassant, mais la question de la langue hante les poèmes du poète, qu’il montre comme des effets[1] de langue destinés à attirer l’attention sur cette hantise non déplaisante. Ses poèmes sont des paons, qui montrent ostensiblement ce qu’ils sont, ils paradent (macabrement, nous l’avons dit), exposent leurs ocelles. Le poète s’est acheté L’amour du français, contre les puristes et autres censeurs de la langue d’Alain Rey, une défense joyeuse de la langue contre les diafoirus de la langue française, ceux que le poète appelle les fixistes ; il aime et cultive l’idée d’une foison baroque de la labilité incertaine et mouvante et gourmande de la langue française, goûte ce que les écrivains ont contribué qu’elle fût (et demeure) grotesque, burlesque, précieuse, galante, libertine, comique et autres transformations et déformations et reformations, exagérations, amplifications et moyens détournés de la rendre attirante, et non point austère, par là, c’est sa participation modeste à la joyeuseté verbale du français ; il recourt à l’uberté de la langue (« Au surplus non seulement le Poète, mais l’Orateur élégant, dira tousjours mesme chose en divers lieux, s’il peut, par trente divers mots & diverses manières de parler, il sçaura toucher & animer ses orgues à divers tuyaux : tant il recognoist la tautologie importune : & tant il sçait que l’uberté & la variété, sont ornemens necessaires de son langage, & lenitifs propres à flatter & endormir l’ennuy de ses auditeurs », Marie Le Jars de Gournay, Les advis, ou les presens de la demoiselle de Gournay, 1634/// ubertas, atis, f. (latin) : puissance de produire, nature riche, féconde ; abondance produite, abondance, richesse). Les poèmes du poète constituent le bâtiment de son être : son complexe abondant, incertain, fragile et complexe. Ainsi, le poème « De l’ancien et du moyen français » ne célèbrera rien d’autre, et comme tous les autres poèmes, la langue libre, libre essentiellement de signification immédiate, jamais inféodée au goût du lecteur, à sa dictature du lisible et du compréhensible et du plaisir immédiat (le poète travaille le plaisir différé). Il se fait plaisir en implosant de joie la langue, EN DÉPIT DU BON SENS (« C’est une brutalité caractéristique de ma part qui a sa cause dans mon être d’une totale complication mais qui vise constamment à la simplification, ce qui l’en éloigne de plus en plus et à des distances de plus en plus grandes… », Thomas Bernhard).




DE L’ANCIEN ET DU MOYEN FRANÇAIS

Lors alors, hé, l’ancien et le moyen de Crestiiens et d’Alcofribas, ensuivis de maint moult autres inserviles auctorités des temps jadis, déréformèrent et décodèrent, en l’enconnant et en la déconnant, miss Frigide et son code de la langue, à en faire rougir le correcteur word, et laquelle en redemandada d’autant d’impertinence joyeuse et dégraphia son corset morphologique, libéra luxuriance et dévoila sa grande métisserie, ce fut, c’était, c’est, ce sera, quand la langue se métamorphose en Langue, ni pure, ni soumise


[1] L’accentuation typographique est destinée aux esprits chagrins qui dénoncent tout ce qui relève de l’effet de style ou de rhétorique, de l’exagération de langue, voire de l’auto-langue, en poésie, où le poème ne doit être, à les en croire, qu’émotion brute, avec coupure entre « le cœur et le cerveau » (mais le cerveau écrit, le cœur pompe).

dimanche 4 mars 2012

10 janvier 2012
Les nœuds syntaxiques ont puissance d’accentuation, non pas du mot, mais de la phrase, ils ont fonction d’accent tonique de phrase, or la phrase du poème en bloc a force nécessité de tonique.


12 janvier 2012
Spontanément, le mot « nodalité » vient à l’esprit, qui n’existe pas, mais l’effet de paronomase fait entendre « modalité », lequel effet sonore engendre l’idée de jeu avec la notion de modalité de la phrase en grammaire : « On parle de modalités ou de types de phrases pour désigner les valeurs variées et efficaces que l’émetteur peut mettre dans ses phrases afin d’appuyer son propos en corrélant le fond et la forme. Il peut ainsi indiquer son intention et provoquer une réaction chez le destinataire du message. » (source internet) La précédente citation pourrait devenir le patron du poème ; les nodalités de la phrase complexe ont pour effet d’appuyer le propos et de produire sur le lecteur une réaction du type étonnement exclamatif. Le poète est un être noué pour la poésie.





DES NŒUDS

Les nodalités d’une corde syntaxique désigne l’ensemble des nœuds accentuels et amusicaux archi serrés d’un gordien laboureur désirant émettre les soubresauts  de la conscience qui est un nœud rythmique indiquant clairement des intentions de monstrer le monde de doutes et de certitudes et de volonté et d’émotions qui se passe (en(-dedans)-dehors) et de provoquer une réaction chez le destinataire du message : ????!... LLLLLK



14 janvier 2012
Sur la lancée du poème juste écrit, le poème suivant, « De la complexitÉ », un poème simple sur le sujet eût pu être écrit, mais le poète ayant renoncé à la simplicité, ne peut céder à cette facilité, qui eût été celle-ci : « Et on dit que ma poésie est difficile » ; effet d’humour, d’auto-ironie, mais plat, qui aurait contourné la difficulté de sa propre expression, et le lent et patient travail de complexe maîtrise qu’elle exige, « La maîtrise d’un art, quel qu’il soit, est le travail de toute une vie » (Ezra Pound). Le poète décide, pour ce poème précisément, de reprendre dans d’autres poèmes ce qu’il a déjà exprimé, et de composer avec, se propose d’accommoder des restes, car répéter avec variations, même infimes, c’est suivre le léger mouvement changeant de la pensée poétique, suivre à la trace ses perfectibilités. Il lui est impossible de faire simple (*nota (rajouté au moment de la saisie de la page du carnet) : bien que récemment encore un poète lui demandait pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple : : : : : : CE QUI N’EST PAS AUSSI SIMPLE). La complexité est consubstantielle à l’être humain, et vouloir rendre compte de la simplicité, c’est omettre une vaste partie de soi et l’essentiel de la réalité, vouloir le simple, c’est nier être perfectible, le simple est un arrêt sur vie, le complexe est du vivre infini, infiniment perfectible. Edgar Morin a affirmé, que la qualité du complexe est sa capacité à contenir le simple, et que l’inverse ne se peut, puisque le complexe est plus vaste que le simple ; on peut considérer que le simple est une réduction de l’espace et du champ de vision (il importe cependant de préciser que le poète ne réduit pas sa réflexion à l’égalité suivante : SYNTAXE SIMPLE = VISION SIMPLE)… Montrer par la syntaxe et l’insignification sa complexité, c’est, en partie, livrer avec énergie ses infinies complexités bouziguées entre elles. Pelote est le poème qui est montré qui est nœuds et tension et énergie de monstration. « Tout se passe comme s’il s’agissait de soustraire la langue à sa transparence de simple medium de significations » (Christian Prigent). Le poème tend au sens, au sens que le poète sait pertinemment impossible, d’un impossible insensé, donc lointain. Fabriquer du poème pour courir le lointain dans le langage, langue au clair.


17 janvier 2012
Écrire un « De la complexitÉ » mimétique du fonds qui anime l’écriture ?, se demande le poète au moment de se mettre au travail. Écrire le poème est tentative de rassembler et condenser mille questions qui se soulèvent au moment de passer à l’acte et au mouvement d’écrire, d’écrire un poème, ou, s’il faudrait préciser, de fabriquer l’écriture du poème. Il sera mimétique ; on dira : c’est difficile ; ça l’est ; sera un O.V.C.Q. (invention du trublion Tortore, qui, pour se gausser du poète, le qualifia un jour d’O.V.C.Q. : Ouvrier Verbal Complexe Qualifié ; crypto-poète).


DE LA COMPLEXITÉ

Sous le bavé, la page, et toute l’étendue des entrelacs et lacis circonvulutionnaires du jeu infini des inter-rétroactions du soi-même en tant comme complexe d’intériorité du « je » sujet de rien du tout avec l’univers tombé partiellement dans l’être dont ça forme l’insens qui est la multiplicité étoilée des significations possibles cryptées et dédaléennes édonc complexes voire illisibles (et por poi que) d’un Ouvrier.Verbal.Complexe.Qualifié. —



mardi 28 février 2012

Suite à une critique justifiée qui lui fut adressée, le poète décida de récrire ses publications sur le blog des 13 et 16 février, afin de resserrer une pensée un peu en désordre. Le lecteur pourra faire comparaison, s'il le souhaite.

5 janvier 2012
« Pour ce que le ris est le propre de l’homme », cuidait Rabelais (note : il arrive mainte fois au poète d’user du médiévisme « cuidier », disparu des dictionnaires de langue française au XVIe siècle, et que les lecteurs de textes anciens et philologues connaissent bien pour ce qu’il abondait dans le sens de « penser, croire », mais aussi « s’imaginer », avec souvent la nuance « à tort », « cuidier » pouvait immiscer la possibilité d’erreur dans ce que pouvait penser celui qui pensait que). Bon. Si le poète a recours à la bouffonesque et au grotesque (au sens de bizarrrie folle, lexicale et grammaticale), il n’est cependant pas un poète comique (au sens historique et littéraire du terme), sa poésie est pince-sans-rire, recherche de discrets effets d’humour, à dessein non pas de faire rire, mais sourire. Son sourire est un rire atténué (un sub-ridere), discret, sans éclat de voix. Le pseudo-rire de Rabelais est beaucoup trop référencé pour ne provoquer qu’un simple éclat de rire, sans articulation d’une pensée ; il provoque un sourire accentué, parce qu’il « se joue de l’Univers » (Madame de Staël), mais c’est un rire intérieur, plus proche du sourire, que le rire franc, extérieur ; on l’appelle rire par défaut. Dans la littérature, l’humour advient le plus souvent dans des jeux de langage, le rire, dans des jeux de situation (Molière). Dans ses jeux verbaux, le poète glisse de l’humour, lance un rire atténué dans le déroulement syntaxique qu’il observe comme un processus parallèle du vivant tiré vers la mort,  inexorablement. Aussi menuise-t-il l’illusion de ralentir le processus par quelques court-circuitages ; et ça le fait sourire ; sourire devant l’idée vaine de l’entreprise, et à l’idée anticipée des reproches de complexité exagérée, ampoulée, emphatique, artificielle, prétentieuse sinon creuse, qui lui seront adressés, défauts que son goût pour le mauvais goût l’amène à revendiquer.



6 janvier 2012
Il rumine,  l’idée : : : d’un poème copié-collé (conscient que le procédé n’est point nouveau de même qu’il n’est guère de procédés nouveaux aux jours d’huy de la poésie contemporaine où les idées et principes et procédés sont copiés et recopiés et sur-copiés sans interruption), l’idée d’un poème qui serait la reprise d’une critique meurtrière dont il fut la cible, par un critique internet, idée à laquelle il renonce aussi vite qu’il l’expose, estimant que cela, même cum grano salis, aurait quelque apparence de masochisme, et accorderait trop d’importance à un petit « capitan des lettres » (la formule est empruntée à un critique du critique) se désignant « lectueur ». Quoique cela soit très tentant, il faut renoncer. Après déambulations dans sa bibliothèque, il ajoute deux citations, de Pascal : « rire dans l’âme », et d’André Breton, « une révolte supérieure de l’esprit » (à propos de l’humour noir), ainsi qu’une troisième, de Pierre Desproges, « on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui ». Le poète va opérer un mix de tout cela.


7 janvier 2012
Il pensait avoir achevé le poème « De l’humour », mais revenant à la liste des poèmes à écrire pour biffer « de l’humour », il retrouve une note ajoutée (entre parenthèses) dans la crainte d’oublier d’y faire, dans le  poème, référence :

« (jeux de mots/jeux de vilain/rire dans la langue/Merlin) »

C’est la raison pour laquelle, sans hésiter plus longtemps, il décide de reprendre le poème afin de glisser les allusions référentielles oubliées, et plus particulièrement à Merlin. Merlin rit devant la mort, qu’il défie lors de ses prophéties, il l’annonce, la sait, la devance, la connaît (il est né sous ses auspices, puisque sa mère, incapable, nonne et vierge, de justifier son enfantement, sera brûlée vive après sa naissance), c’est la part maligne de lui qui creuse dans sa bonté de mi-humain ; c’est un rire mélancolique, car Merlin sera habité par la mort des autres, et de surcroît, il rit de la sienne, du rire sarcastique de l’ermite ; un rire repris dans le rire du personnage de Zarathoustra de Nietzsche, de celui qui regarde les choses de haut, parce qu’il en connaît origine et destinée ; le rire de Merlin est force qui traverse les temps ; est rire dans la langue ; « Si Merlin rit, c'est donc parce qu'il incarne le personnage de l'écrivain à l'intérieur de son œuvre : observateur privilégié de tous les aspects de celle-ci. S'il rit de la mort, c'est parce que les procédés de la fiction, ainsi que ceux du fétichisme et de toute pensée théorique dont ils constituent le modèle, risquent de dévoiler le caractère accidentel de la différence qui existe non seulement entre le Moi et l'Autre, mais aussi entre le dedans et le dehors, la chose et sa représentation, l'esprit et la lettre — et, finalement, de la différence entre la vie et la mort. » (Howard Bloch) Le personnage de Merlin est insaisissable, ermite et cultivé, pacifiste et belliqueux, mi-homme mi-diable, c’est un être indéfini qui manie la subtilité langagière (cf. l’épisode du « Baron aux trois morts »), de même qu’il sait sa mort quand il répond favorablement à la requête de Niniane de lui apprendre ses pouvoirs (et dans certaines versions du roman, il rit avant que de lui répondre) ; c’est le rire d’un être insaisissable (jusque dans les diverses adaptations ou exégèses), qui change constamment de « semblance », « cest gens qui me cuident connoistrene sevent riens de mon estre » (Huth Merlin) Le rire de Merlin, que le poète reprend à son compte, est un rire lancé dans le futur de la phrase en bloc, il exprime le plaisir de tailler dans le lard syntaxique, à dégrammatiser, à néologiser, à poser des mots d’esprit ici ou là, ou des chausse-trappes syntaxiques, à forcer l’illusion de résistance à l’inexorable, à être critique de la norme, le rire de Merlin est exemplaire du travail du poète, un phénomène liminal (H. Bloch), « au point précis où le sens est produit à partir du non-sens » (J.Lacan), mais atténué par la vanité de l’entreprise ; sourire dissimule désillusion. Le poète, un être indéfini qui manie la subtilité langagière ?  Le rire de Merlin, un rire atténué par la subtilité narrative du cycle qui trace son existence indéfinie, par le temps humain et romanesque, un sourire devenu ?